Le torchon brûle entre les infirmiers libéraux et le syndicat minoritaire des pharmaciens d’officine. Se prévalant d’un prétendu accord du ministère de la Santé, l’USPO a entamé une campagne de communication pour pousser les pharmaciens à vacciner au domicile des patients. Explications.
La FNI le sait, la défense des missions et prérogatives des infirmières libérales est un combat de chaque instant. Et voilà qu’en pleine campagne de vaccination contre la grippe saisonnière, le syndicat de pharmaciens minoritaire USPO, se targue, dans un communiqué de victoire, d’avoir obtenu le feu vert du Gouvernement à la vaccination à domicile par les pharmaciens.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 prévoit l’extension des compétences vaccinales de plusieurs professions. Les infirmiers, les pharmaciens, sages-femmes et biologistes médicaux sont autorisés à prescrire et administrer aux publics-cibles les vaccins prévus dans le calendrier vaccinal, ainsi que ceux contre la grippe saisonnière aux personnes âgées de onze ans et plus, ciblées ou non ciblées par les recommandations vaccinales. Les textes d’application parus au Journal officiel durant l’été, (lien vers je JO du 9/08) ont précisé les conditions de mise en œuvre de ces nouvelles compétences vaccinales. Y sont notamment longuement détaillées les conditions de réalisation de la vaccination dans les locaux des officines. Sur papier, tout devait “rouler” afin de mobiliser le plus grand nombre de professionnels de santé sur le déploiement de la vaccination.
Info ou intox ?
Alors que s’est-il réellement passé entre les services du ministère de la Santé et l’USPO, pour que ce syndicat s’autorise un tel triomphalisme ? Ce que l’on sait, c’est que les compétences vaccinales sont confiées aux pharmaciens pour être exercées en propre par les pharmaciens eux-mêmes, et non de la pharmacie ou du laboratoire de biologie médicale en tant que lieu d’activité. Et cela, dans un but très précis, celui de permettre la mobilisation des pharmaciens dans le cadre des campagnes de santé publique, comme la vaccination contre le virus HPV dans les collèges. Les services du ministère ont-t-il fait une « boulette » en sur interprétant les textes ? Info ou Intox ? La FNI a demandé au ministère de s’expliquer.
La tentative de l’USPO de s’arroger une prérogative des infirmières libérales, a déclenché la colère légitime des infirmières libérales et de tous les syndicats infirmiers. Tous… sauf un : Infinidel, cabine téléphonique non représentative, est curieusement venue au secours de l’USPO (Lien vers le communiqué USPO/Infinidel). On ne peut que lui souhaiter bonne chance pour aller expliquer aux IDEL dont les commandes de vaccins sont retenues par des pharmaciens peu scrupuleux préférant conserver les doses pour vacciner à l’officine !
Qui sème le vent récolte la tempête
Après la réponse cinglante des syndicats infirmiers représentatifs, au premier rang desquels la FNI (lien vers CP FNI), l’USPO s’est posée en victime injustement attaquée invitant les infirmiers à une réunion de pacification. Que le président de l’USPO veuille jouer aujourd’hui les pompiers pyromanes est une chose, qu’il utilise sous couvert d’objectifs collectifs et de stratégie vaccinale pour gagner des champs d’activité en dehors de l’officine au détriment des infirmiers, en est une autre.
Plus encore, la colère des IDEL s’explique par les motivations profondes de l’USPO, qui, depuis des années, cherche à investir le champ du domicile et des EHPAD. Une ambition dévorante que ce syndicat tente de légitimer à grand renfort d’enquêtes orientées, n’hésitant pas à instrumentaliser les patients. En janvier dernier l’USPO avait bombé le torse en présentant les résultats d’un énième sondage aux questions très orientées. A la question « Lorsque vous êtes dans l’impossibilité de vous déplacer, trouvez-vous utile que votre pharmacien dispense votre traitement à domicile ? ». Sans surprise les patients interrogés ont répondu OUI à 89,42%, NON à 3,13%, et 7,45% des répondants ne se sont pas prononcés.
Alors pourquoi pas un sondage FNI qui nous éclairera sur le ressenti des IDEL sur la thématique : prenez 2mn de votre temps pour répondre au sondage en cliquant sur le lien https://forms.gle/XMGev5N64AxowpQd6
Dans ce contexte, il est difficile d’accorder du crédit à l’USPO qui presse les syndicats infirmiers à une rencontre pacificatrice tout en les accusant de « manquer de discernement ». La FNI qui ne s’est jamais soumise aux oukases des syndicats de médecins n’entend pas se mettre aux ordres de l’USPO.
La FNI qui s’est entretenue avec le cabinet du ministre de la Santé et de la Prévention, participera, en revanche, à la réunion que le ministère prévoit d’organiser avec l’ensemble des syndicats représentatifs infirmiers et pharmaciens pour apporter toutes les clarifications sur cette affaire qui comporte plusieurs zones d’ombre..
Ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain
Au rebours de l’USPO, la FSPF, syndicat très majoritaire chez les pharmaciens, estime que la place du pharmacien est à l’officine. La FNI travaille en bonne intelligence avec ce syndicat depuis des années, dans le cadre de l’organisation syndicale pluri professionnelle qu’ils ont créé ensemble : Les Libéraux de Santé. Elle travaillera avec la FSPF à la valorisation de la prescription des vaccins par les infirmiers et les pharmaciens, chacun à leur place.
La FNI ne mettra pas tous les pharmaciens dans le même sac. Mais ils doivent savoir, tout comme le ministère de la santé, qu’elle ne laissera pas démanteler les missions infirmières sans réagir.