Le rapport de l’Igas d’octobre, intitulé Évolution de la profession et de la formation infirmières, a un peu plus fait entrer le loup dans la bergerie. En effet, s’il ne prône pas expressément la suppression du décret d’actes, texte fondateur du métier socle des Idel, il invite à changer de paradigme en lui adjoignant parallèlement des missions qui seraient dévolues aux Idel mais pas que… La FNI n’est pas contre mais que dans des domaines bien définis.
« Les constats établis par la mission invitent à passer à une échelle supérieure dans l’évolution du champ de compétences des infirmiers. Pour autant, la diversité des missions actuelles et des lieux d’exercice des infirmiers conduit à envisager deux approches, l’une fondée sur une évolution du décret d’actes, l’autre consistant à poser les missions dans lesquelles les infirmiers pourraient disposer d’une plus grande autonomie. Ces deux approches ne sont pas exclusives. » Tout est dit… ou pas par l’Igas dans son rapport.
Que l’exception ne se mue pas subrepticement en règle
L’Igas suggère en effet une vision cumulative plutôt que clivante. D’une part, il s’agirait d’identifier les actes susceptibles d’être intégrés dans le socle de compétences des infirmiers, en clair de rejoindre le rôle propre de l’infirmier et ainsi de ne plus dépendre de la prescription médicale. En l’occurrence, les actes déjà réalisés par une partie des Idel sur le terrain, en libéral ou en établissement, en dehors de leur champ de compétences. D’autre part, la « seconde approche consisterait à déterminer les missions à développer en se fondant sur les besoins insuffisamment couverts dans le système actuel et sur la capacité de la profession infirmière à y répondre en lien avec les autres professions de santé », précise l’Igas. En clair, la prévention, la coordination et les soins de proximité.
Pourquoi pas, répond la FNI (lire également l’article sur les propositions de la FNI au ’HCPP) à condition que l’exception ne se mue pas subrepticement en règle. En clair, que le métier socle ne soit pas, à l’avenir, fondé quasi exclusivement sur un corpus de missions et que les actes qui le constituaient jusque-là ne soient pas réduits à une peau de chagrin. En somme, qu’un décret par mission ne se substitue pas au décret d’actes. C’est pourtant ce que semble vouloir le ministère de la Santé, l’Ordre et la Fnesi, au double nom d’une évolution dictée par les nouveaux besoins sanitaires des Français et des carences du système de santé.
Ne pas cautionner une telle folie
Ce qui reviendrait à couper la branche sur laquelle nous sommes assis, prévient la FNI qui entend faire œuvre de pédagogie pour convaincre l’ONI et la Fnesi de ne pas cautionner une telle folie. « Si le décret d’actes venait à être abrogé, les Ide n’auraient plus le monopole pour effectuer lesdits actes, lesquels pourraient l’être par d’autres dans le cadre de missions qui seraient accessibles à plusieurs professions, prévient la Fédération. Dans le contexte actuel de porosité et d’hybridation des métiers, n’importe qui pourra faire n’importe quoi. Nous sommes favorables aux missions dès lors qu’elles sont circonscrites à une approche populationnelle, notamment la prévention, l’ETP et les missions de santé publique. En outre, il ne faut pas s’imaginer qu’inversement, l’avènement de ces missions permettra à la profession infirmière d’étoffer son champ de compétences » Sans compter l’impact sur les relations conventionnelles, les Idel n’ayant alors plus la possibilité de négocier pour eux-mêmes la rémunération d’actes auxquels ils ne seraient plus les seuls habilités à procéder.
La refonte du diplôme oui, mais pour de bon
La FNI est favorable à une refonte du diplôme infirmier mais entend aller plus loin, le problème ne se limitant pas seulement au référentiel de formation. Il s’agirait, dans une démarche plus globale, de revoir les modalités de sélection des étudiants, les contenus du cursus tout en déployant des mesures de maintien de l’emploi.
L’Igas propose, pour se conformer à la directive européenne tout en conservant une durée globale de formation de trois ans, de réorganiser la formation pour atteindre 4 600 heures dont, d’une part, 2 300 heures de formation clinique, stages et exercices de simulation en santé, et d’autre part, 2 300 heures d’enseignement théorique dont 500 heures de travaux personnels et collectifs encadrés. Pour ce qui est de ce dernier point, il s’agirait, ni plus ni moins, aux yeux de la FNI, d’un pansement sur une jambe de bois. La Fédération est davantage partisane de l’ajout d’une année supplémentaire avec les modules en sus qui iraient avec afin de décrypter aux futurs IDE l’écosystème de soins. En effet, « les abandons en cours de scolarité s’expliquent par le fait que les jeunes ont perdu le sens de leur activité. Ils n’arrivent plus à se situer dans le système ».