Pratique avancée : pourquoi ça ne marche pas

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La Cour des Comptes s’est penchée sur la pratique avancée pour identifier les obstacles à son essor. A la clef, un audit au titre évocateur – « Les infirmiers en pratique avancée : une évolution nécessaire, des freins puissants à lever » – dont les conclusions ont été publiées début juillet. L’identification de leurs causes autant que les préconisations vont dans le sens de ce que la FNI réclame et dénonce depuis le départ. De fait, les médecins ne sont pas épargnés, c’est le moins que l’on puisse dire.

Pour la Cour des comptes, « les réticences des médecins constituent le premier et le plus fondamental des freins qui s’opposent au déploiement de la pratique avancée ». Et ce, dans la mesure où « lorsque des IPA sont installés en ville, les médecins refusent trop souvent d’orienter vers eux des patients dont la situation relève des compétences de ces professionnels paramédicaux, par méconnaissance ou par crainte de concurrence. » Résultat : alors que « les IPA sont censés être dotés d’une forte autonomie, l’exercice de leurs compétences est toutefois strictement encadré à la demande des médecins. Ils sont peu favorables au partage de leur patientèle. Ils craignent une concurrence financière en libéral mais aussi d’être confrontés à des patients à l’état de santé dégradé et en perte de chance, faute, pour l’IPA, de les avoir orientés à temps. Ils doutent, en effet, qu’une formation de deux années suffise à permettre aux IPA d’assurer les nombreuses missions susceptibles de leur être confiées. » La FNI n’aurait pas affirmé autre chose… 

« Si le médecin ne souhaite pas partager sa patientèle, l’IPA ne peut pas exercer » 

Et la Cour d’enfoncer le clou sans le moindre ménagement à l’égard des intéressés en pointant le hiatus entre la « forte autonomie » des IPA et le fait qu’il « conservent un caractère auxiliaire qui se manifeste par un double encadrement ». Pourquoi ? Parce que  « l’exercice en pratique avancée, dans le prolongement de la logique de parcours, ne peut se réaliser qu’au sein d’une équipe de soins primaires ou en établissement de santé, coordonnée par un médecin ou en assistance à un médecin spécialiste. Même si, en lui-même, le protocole peut être très souple, rien n’obligeant le médecin à entrer dans le détail des soins à réaliser par l’IPA, le médecin est à même de réduire très fortement le cadre d’exercice des IPA par ce dispositif. ». En outre, il appartient au seul médecin de déterminer les patients auxquels un suivi par un IPA est proposé. En clair, rappellent les Sages de la rue Cambon, « si le médecin ne souhaite pas partager sa patientèle, l’IPA ne peut pas exercer ». CQFD.  

Toute aussi coupable est la propension des médecins à « collaborer de manière plus naturelle avec d’autres professionnels ». Qui donc ? « Il s’agit, répond la Cour des Comptes des assistants médicaux, des infirmiers Asalée, et de ceux bénéficiant de protocoles de coopération dont le champ de compétence, très circonscrit, et le modèle économique, salariat pour l’essentiel, ne constituent pas une menace pour les professions médicales, particulièrement sur le plan financier »

« Le ministère se doit de répondre aux craintes exprimées » 

L’autre grand frein à l’émergence des IPA a trait au modèle économique qui, en ville, ne leur permet pas « de vivre de leur activité ». Si « ce modèle a évolué et est désormais plus favorable, il ne lève pas pour autant l’obstacle de l’orientation des patients par les médecins, ce qui les maintient dans une situation économique précaire. » En somme, « au regard de l’effort de formation consenti, les perspectives financières et les postes proposés présentent, dans des proportions qui demeurent inconnues, un intérêt inférieur à ce qui a été annoncé initialement puis qui est attendu. » 

Quant aux études, non seulement elles s’inscrivent dans le cadre de la formation continue mais elles sont onéreuses : 48 000 euros selon une évaluation de la Fédération hospitalière de France (FHF) incluant l’hébergement et la restauration. Ce qui suppose des sacrifices de la part des Idel qui aspirent à devenir Ipal.  Dans ces conditions, que faire pour éviter l’enlisement ? « La loi (consacrant l’accès direct et le droit de prescription, N.DL.R.) ayant été adoptée, il convient de faire pleinement vivre le métier d’IPA malgré l’opposition persistante d’une partie des médecins, martèle la Cour. Pour y parvenir, le ministère se doit de répondre aux craintes exprimées, par exemple en définissant des guides ou des référentiels précisant les missions des IPA, ou bien, sur le modèle de certains pays étrangers, en prévoyant des formations complémentaires les préparant au droit de prescrire en première intention. »

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