Une première réunion de concertation réunissant les syndicats infirmiers – dont la Fédération Nationale des Infirmiers (FNI) – les syndicats de médecins et leurs Ordres respectifs autour des projets de textes réglementaires sur l’infirmier de pratique avancée (IPA) a récemment eu lieu. Selon ces projets, la plupart des missions de l’infirmier de pratique avancée font déjà partie du quotidien des IDEL et depuis longtemps !
Il en est de même pour les prises en charge ciblées avec les personnes âgées et les patients souffrant de maladies chroniques ! Pour ce qui concerne les nouvelles missions, elles font elles aussi partie du socle des compétences infirmières, c’est le cas, par exemple de l’éducation à la santé ou du suivi du patient diabétique où en plus de contrôler les taux de glycémie et adaptent les doses si nécessaire.
Autrement dit, on réinvente l’eau chaude et l’on ne va pas assez loin au regard de ce qui pourrait être mis en place à l’instar de ce qui existe par exemple au Québec en matière de prescription.
Pour la FNI, les IPA ne constituent pas une avancée vers plus d’autonomie mais un recul vers plus d’encadrement. En effet, les IPA interviendraient sur une patientèle que leur indiquerait le médecin et sous la tutelle de celui-ci. Ainsi il s’agit d’une mesure cosmétique qui est en réalité un recul pour la profession vers moins d’autonomie.
De leur côté, les médecins, qui ont pris l’habitude de crier avant d’avoir mal, redoutent de voir une partie du budget affecté à leurs actes glisser vers la rémunération de ces infirmiers.
Au total, personne n’est satisfait parce que les urgences sont ailleurs. Sur le terrain les infirmiers, comme les médecins, réclament des moyens et des outils pour organiser et financer la coordination. Parce que les vraies priorités sont là, et non dans des mesures gadget, la FNI porte ce sujet à la fois dans la négociation interprofessionnelle qui vient de débuter et dans la négociation conventionnelle en cours.
Au-delà, la FNI réclame une évolution du métier à travers l’instauration de protocoles de suivis thérapeutiques et d’adaptation de traitements en exploitant pleinement les compétences infirmières déjà décrites dans le code de la santé publique. Par ailleurs il convient d’enrichir la liste des actes médicaux délégués, les IDEL doivent pouvoir assurer seuls la surveillance et le retrait des cathéters péri-nerveux, ou intervenir dans le cadre des urgences et de la permanence des soins en s’inspirant des protocoles des infirmiers sapeurs-pompiers.
Néanmoins, la question des perspectives de carrière en libéral ne doit pas être mise de côté.
À l’hôpital, l’émergence de pratiques avancées constitue peut-être une forme de progression de carrière pour les infirmières en dehors de la fonction d’encadrement. En libéral c’est tout le contraire. Ce qu’on nous propose, ce sont les IPA – ficelés pour réaliser, sous la coordination du médecin et “son autorité diagnostique et thérapeutique”, ce qu’il était en grande partie possible de faire préalablement en toute autonomie. C’est le monde à l’envers !
Si l’on veut réellement offrir des perspectives de carrière aux IDEL, la FNI pose une question toute simple : pourquoi ne pas construire des passerelles ou créer « un tour extérieur » permettant aux IDEL d’intégrer les études de médecine pour devenir médecin ? Sachant que le parcours requis devenir IPA est d’environ sept ans (trois ans d’études + deux ans d’expérience hospitalière + deux ans de spécialisation IPA), il serait sans doute préférable de permettre aux IDEL qui en ont l’envie de devenir médecins. Voilà une ambition qui ferait l’unanimité à l’heure où on manque cruellement de médecins généralistes dans les territoires !